Ici

Quand j’étais petite, je vivais dans un village contenant plus de vaches que d’habitants, comme avait l’habitude de répéter ma maman. C’est peut-être pour cela que j’ai voulu découvrir le monde.  J’ai eu besoin de casser l’oppression que les forêts de sapins provoquaient dans mon cœur, rompre avec la petitesse des 80 maisons rurales qui se suivaient le long de la route.

Quand j’étais petite, j’étais timide aussi et je n’osais pas dire ce que je pensais par peur de ne plus être aimée. J’ai fait tout ce que l’on me disait, comme il le fallait, sans jamais rechigner. Certains sont rebelles très jeunes, d’autres le sont dans les gestes ou dans les mots. Ma rébellion a été silencieuse et tardive, celle de partir loin, très loin. Je pense que l’envie de liberté m’est aussi venue en suivant un cours de pensée africaine à l’université. Mon professeur congolais m’a transporté dans un autre monde : Les concepts de négritude d’Aimé Césaire et Léopold Sédar Senghor ; Kwame Nkrumah, le panafricanisme et ce rêve d’être libre et d’être soi-même ; L’histoire des grands et souvent monstrueux explorateurs du 19ème siècle avec leurs histoires si étranges de cannibalisme et de mœurs lointaines ; La Société des Nations, la première société mondiale après la guerre…Tous ces chiffres, ces personnages et ces mots m’ont fait rêver. A la fin de l’université, je savais déjà que mon monde serait celui d’ailleurs. Bien sûr, il serait erroné de dire que mon village d’enfance et ce cours sont les seuls facteurs qui m’aillent conduit à l’étranger. Ils ont été multiples, divers et surprenants quelques fois. Mais ils m’ont amenée à être qui je suis et là où je voulais : une coopérante internationale travaillant dans les pays en voie de développement.

Là-bas

Pour qu’un diamant vaille son pesant d’or, la taille de toutes ses facettes conditionnent directement sa beauté et sa valeur. Pour moi les multiples facettes de la planète et de ses peuples représentent le plus beau des diamants. Chaque facette constitue l’équilibre de la terre et chacune est fondamentale pour la faire luire.  J’ai été fascinée par ses formes et ses couleurs durant plus de 10 ans et encore aujourd’hui. La nature et les animaux, les cultures et ses différences, ses croyances, l’apprentissage de l’inconnu et de soi-même, surmonter ses peurs, avoir du courage et aller de l’avant. Mais si un diamant est brillant et sublime, il est aussi pointu et coupant. Je  me suis  blessée à son contact et je suis souvent tombée de haut : Les syndicats et les associations paysannes de l’Amérique centrale m’ont enseigné le manque de valeurs éthiques des entreprises multinationales ; Les centaines de femmes et d’enfants qui chaque mois sont violées et mutilées au Congo m’ont appris la signification profonde et réelle du mot impunité ; Les inondations en Haïti m’ont quant à elles, ouvert les yeux sur la réalité du mauvais traitement que l’on fait à la nature et ses conséquences pour l’humain comme les  inondations, le choléra, les terres trop arides pour la culture.

Ici

Il est difficile de revenir. Car on ne revient jamais vraiment de là-bas. Dans les valises du retour, j’ai tout embarqué : l’espoir, l’illusion, la détermination, la croyance, la résilience, la peur, la tristesse, le dégoût, la rage, le découragement, les possibles et les impossibles. Quand j’ai ouvert ma valise, je me suis demandé où j’allais bien pouvoir placer ce matériel. Dans un carton sous le lit pour oublier ? Accrocher au mur comme un trophée que l’on admire ? Je ne savais que faire.  Mais petit à petit, j’en ai rangé quelques-uns sous le lit et j’en ai repris d’autres avec moi, dans les poches, dans la tête, dans le sac à main, dans le cœur, dans l’ordinateur. Car on ne change jamais vraiment, on évolue. La « machine » humaine a cette folle capacité d’être bien souvent résiliente !

Aujourd’hui, c’est là, sur une des branches d’Arbolife, que j’aimerais déposer quelque chose.  Je ne sais pas encore quoi et comment, alors je commence par me déposer moi-même.

 

A propos de l’auteur:

Catherine Zürcher est une coopérante internationale qui a travaillé dans les pays en voie de développement et en post conflit pendant plus de 10 ans, dans divers ONG et organisations internationales. Elle est très impliquée dans les questions de droits de l’Homme, plus spécifiquement l’égalité de genre, la protection et la gestion des conflits. Elle aimerait aujourd’hui consacrer son temps à sensibiliser les acteurs privés et publics et les accompagner sur les réflexions et les actions possibles face aux objectifs de développement durable, qui sont selon elle, un véritable défi pour la paix et la stabilité internationale.

1 commentaire
  1. Anne Garufo Il y a 5 ans

    💕

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